Fontainebleau 2024 : L’élevage Champloué coiffe les Normands au poteau dans le Criterium des juments de 4 ans
Décidément, il est des affixes inséparables de la Grande Semaine. Après Huricane et Italia, voici venue KAPELLA DE CHAMPLOUE, montée comme sa mère par Eric Lelièvre. La bai s’impose dans ce Critérium 2024 à la faveur de son classement au Top 100 SHF. Elle devance deux Normandes et même deux Manchoises, KANDY DU MESNILDOT et KAWAII SEMILLY.
Kapella de Champloue, la saga continue
Avocat en droit équin, Jean-Marie Charlot semble réussir sa seconde vie professionnelle, celle d’éleveur de chevaux de sport. Les succès s’enchaînent génération après génération. Si beaucoup se souviennent de l’étalon Huricane de Champloué qui fut Champion Cycle Classique des 5 ans hongres & mâles, et désormais sous la selle de l’irlandais Bertram Allen, nombreux sont ceux qui avaient adoré voir Italia de Champloué s’imposer dans le Championnat Cycle Classique 4 ans juments voici deux ans. Cette année, c’est au tour d’une nièce de ces deux cracks de l’emporter : KAPELLA DE CHAMPLOUE. « Sa mère Brunetta de Champloué s’est classée 6ème du Championnat des 6 ans » se souvient son naisseur. « C’était une bonne jument mais malheureusement elle a reçu un coup de pied et nous avons dû la mettre au repos à 5 ans. Nous avons alors pratiqué des transferts d’embryons. Elle nous a donné trois poulains, dont Hermione de Champloué, Très Bonne à 6 ans et sélectionnée pour représenter le stud-book Selle Français au Championnat du Monde des stud-books. Ensuite, Brunetta a repris le sport à 6 ans mais sa blessure est réapparue l’année suivante. »
KAPELLA DE CHAMPLOUE & Eric Lelièvre - Crédit photo : PSV Photo
Arrêtée définitivement, la fille de l’international Winningmood vd Arrenberg a d’abord donné Kapella de Champloué. « Elle ressemble beaucoup à sa mère, très concours et respectueuse, toujours appliquée » témoigne Jean-Marie Charlot. « C’est la souche de Sophie du Château où l’on retrouve beaucoup de sang. C’est parfois difficile à gérer, elle a un peu de caractère. Toscane, sa grand-mère maternelle, était très raide, dure dans le dos, alors j’essaie de croiser cette lignée avec des étalons apportant de la souplesse. » D’ailleurs, cette saison, le Haut-Marnais a opté pour l’olympique Ermitage Kalone. Vendue à Armand Blanc en début d’année de 4 ans, Kapella ouvre ainsi son palmarès en vue d’une carrière prometteuse. « Je travaille énormément cette souche ainsi qu’une seconde descendant de Laudanum. De celle-ci, mon fils montait une fille de Diamant en complet international que j’ai réussi à récupérer cette année pour la reproduction. Je pratique chaque année des transferts et des ICSI ». Comme d’autres, le Nivernais d’origine a découvert le nouveau règlement SHF pour les 4 ans. « Le Critérium a le mérite de récompenser la régularité, sans tenir compte du jugement humain » dit-il. « Ce qui est amusant, c’est que les deux Critériums des 4 ans, juments et mâles & hongres, ont été gagnées par les vainqueurs du CIR de Cluny...c’est sans doute un petit clin d’oeil aux normands » conclut-il avec humour.
KAPELLA DE CHAMPLOUE & Eric Lelièvre - Crédit photo : PSV Photo
Au pays de Kandy du Mesnildot
Après un détour par le Grand-Est, nous voici de retour en terres normandes, à Thèreval précisément, aux portes ouest de Saint-Lô, la capitale de l’élevage. Affixe régulièrement à l’honneur, les « Mesnildot » de la famille Hervieu se firent remarquer dès...1983 grâce à Max du Mesnildot (Beau Manoir, sf), finaliste à 5 et 6 ans. Une toute autre lignée que celle de la vice-championne de ce Critérium des 4 ans juments puisque la mère de KANDY, Scarlett St Jean (Nartago, sf) fut élevée par Madeleine Legrand, située à Gouffern en Auge dans l’Orne. Eleveur professionnel, Antoine Hervieu voit grand. « Je possède 250 hectares, j’élève pour des clients étrangers et moi-même essentiellement, avec environ 250 chevaux à la maison » détaille-t-il. Les chiffres donnent le vertige. « J’ai fait naître 73 poulains cette année et 70 juments sont pleines pour l’année prochaine, mais pas uniquement pour moi. J’en ai une vingtaine pour mon compte. Cela fait une dizaine d’années que j’élève beaucoup, c’est pour ça que je commence à cueillir les fruits de mon travail. » Agriculteur depuis toujours, principalement spécialisé dans les chevaux, Antoine Hervieu a la fibre de l’élevage chevillée au corps. « Mon père élevait des bovins » raconte-t-il, « et j’ai petit à petit cultivé des céréales depuis que ma surface a augmenté, ce qui m’aide à nourrir et pailler tout ce petit monde. » Héritier de la souche de son grand-père Eugène, il travaille également d’autres lignées comme celle de Kandy. « La mère avait été achetée par Emilio Malta Da Costa et elle a atterri chez moi. Comme on se connaît depuis longtemps, il me laisse pratiquer des transferts d’embryons sur leurs juments pour faire progresser ma souche et la leur en même temps. Scarlett a produit plusieurs poulains avant, grands avec beaucoup d’action. Je n’avais encore jamais utilisé Candy de Nantuel et je me suis dit qu’on allait essayer. Je me souviens de sa naissance, une demie-heure après, elle galopait autour de la mère. »
KANDY DU MESNILDOT & Kévin Graindorge - Crédit photo : PSV Photo
Grâce à sa grande surface d’exploitation, l’éleveur peut se permettre de commercialiser ses produits à partir de trois ans. « J’aime bien les voir sauter » admet-il, « ils sont tous à vendre quels que soient les résultats. Le circuit SHF est très important pour moi, car c’est de cette façon que l’on montre nos chevaux. Autrement les clients ne viendront pas chez moi spontanément. A Fontainebleau, on rencontre du monde, parfois aussi des clients pour le centre d’insémination en partenariat avec notre vétérinaire. » 110 récoltes d’embryons ont été menées cette année...ce qui représente beaucoup de travail. « La Grande Semaine, c’est un moment de repos » dit-il en plaisantant. « En arrivant ici, j’avais deux chevaux dans les premiers du Top 100 SHF. Cela s’est moyennement passé pour l’autre le premier jour mais il s’est rattrapé. Il faut se fixer des objectifs pour avancer » dit-il. Fier de sa Kandy, le Manchois place beaucoup d’espoirs en elle. « Elle a du sang, et m’a déjà donné des poulains donc je suis ouvert à la vente. La mère sautait 1,45m à 8 ans, donc le potentiel est là. Elle n’évoluera peut-être pas à haut niveau mais sera sérieuse. » Fidèle en affaires, Antoine Hervieu l’est aussi avec les pilotes. « Je travaille avec Eric Lelièvre depuis quinze ans. On a tous les deux un peu de caractère mais ça s’arrange toujours » ajoute-t-il en riant.
KANDY DU MESNILDOT & Kévin Graindorge - Crédit photo : PSV Photo
Kawaii Semilly, le talent pur
La semaine a bien débuté pour Anne-Sophie et Richard Levallois, présents comme d’habitude à la Grande Semaine pour voir évoluer leurs nombreux finalistes. Certes, cette jolie KAWAII ne leur appartient plus – vendue à l’Alsacien Alphonse Wanner, installé au sud d’Avranches – mais ils ne boudent pas leur plaisir d’admirer les performances de leurs poulains. Bien que le nom de sa mère Dirhame de Kheos (Diamant de Semilly, sf) ne sonne pas très « Semilly », il s’agit pourtant d’une lignée maternelle bien connue et valorisée par les Manchois, celle de La Mare (Apache d’Adriers, sf), la mère de l’international Rock’n Roll Semilly, Djagger Semilly (ISO 165), ou encore l’étalon Funky Music Semilly. « Dans cette souche là on choisit toujours des noms en rapport avec la musique » explique Anne-Sophie. La mère de Kawaii est d’ailleurs la propre sœur de Rock’N Roll. « Nous l’avons vendu l’an dernier lors de la vente aux enchères que nous avons organisée. Nous étions contents de proposer une jument de cette souche, avec une super lignée maternelle. Nous voulions montrer le meilleur de notre production. Nous sommes ravis que ce soit un éleveur français qui ait investi dans cette souche et qu’il ait été récompensé par une saison parfaite ».
KAWAII SEMILLY & Simon Gallet - Crédit photo : PSV Photo
Bien que très attachés à leurs juments, les Levallois ont ainsi montré qu’ils savaient aussi partager la qualité de leur génétique. « C’est toujours difficile de s’en séparer mais nous ne pouvons pas non plus tout garder. Nous avions peut-être la réputation de ne garder que les bons, et nous avons voulu casser cette image » dit Anne-Sophie, « cette vente nous a permis de proposer des pouliches de qualité avec de bonnes souches maternelles, et avec ces bons résultats, c’est la meilleure publicité possible » ajoute Richard. Balou du Rouet x Diamant de Semilly, tel est le croisement imaginé par le couple. « Je pense que Balou transmet un peu de caractère, des chevaux pas toujours faciles. La souche de La Mare donne des poulains guerriers, bien dans leur tête, avec un bon mental. Balou amène du piquant gérable. Clairement, je ne m’en servirais pas sur des juments compliquées. » Souche prolifique s’il en est, La Mare continue d’essaimer dans les prés de Couvains, pendant que ses filles et petites-filles perpétuent ses qualités sportives sur les terrains.
KAWAII SEMILLY & Simon Gallet - Crédit photo : PSV Photo
Mickael Blanc, fils d'Armand le propriétaire et Eric Lelièvre son cavalier, nous parle de cette très bonne jument dont ils sont fiers : "On ne peut pas demander mieux" ! :
Le palmarès de ce Critérium Cycle Classique 4 ans Juments 2024
1- Kapella de Champloue, sf (Cicero Z), née chez Jean-Marie Charlot (Grand-Est), montée par Eric Lelièvre (Aube) – 12 sans faute sur 12 sorties - 3ème du Top 100 SHF – 866 € de gains
2- Kandy du Mesnildot, sf (Candy de Nantuel, sf), née chez Antoine Hervieu (Normandie), montée par Kevin Graindorge (Manche) – 11 sans faute sur 12 sorties – 11ème du Top 100 SHF – 753 € de gains
3- Kawaii Semilly, sf (Balou du Rouet, old), née chez Richard Levallois (Normandie), montée par Simon Gallet (Manche) – 10 sans faute sur 10 sorties – 14ème du Top 100 SHF – 738 € de gains